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Photo du rédacteurKarine Ulcoq

Les slogans

On vit dans une époque où les slogans prolifèrent, au détriment de leur sens véritable.

 

On vit dans une époque où l’on proclame que la différence est une richesse et que la diversité est essentielle.

Où l’on met en avant le besoin d’authenticité, où l’on prône la liberté d’être soi, à tout prix, peu importe les autres, les regards et les avis contraires.

Où l’inclusion et le bien-être font partie des stratégies organisationnelles.

Où le respect et la bienveillance sont des mots dont la définition est apprise dès la naissance.


Tout cela est important, primordial même.

Mais est-ce suffisant ?


Car, comment parler de liberté d’expression à cette jeune femme qui lors de son mariage à l’état civil, devant sa famille et sa belle-famille réunies, entend l'officier lui dire lors de la signature, qu’il est important qu’elle ne "parle pas fort", surtout à son mari et à sa belle-mère, car elle leur "doit du respect" ? Ce même officier qui rajoutera que lui-même a dit à sa femme lors de leur mariage qu’elle ne devra jamais élever la voix, tout cela généreusement accompagné de ce geste qui verrouille les lèvres et, ce faisant, la voix.


Comment parler de respect à cette jeune femme qui marche sur le trottoir, la tête encombrée de mille pensées, en pleine journée et peu importe d’ailleurs, et qui se fait apostropher, siffler et insulter par deux conducteurs qui auront décidé de ralentir pour prendre le temps de répondre à leurs pulsions, avec l'assurance déconcertante de ceux qui pensent que le respect n’est qu’un mot ?


Comment fait-on pour être soi, pour s’accepter tel que nous sommes, pour avoir le courage de ses rêves et l’envol de ses décisions si, au détour de chaque chemin, on croisera les regards perçants de ceux qui, dérangés par les actes de bravoure peu conventionnels, ont décidé que le prix à payer sera l’hostilité, le jugement, la sentence et la condamnation ?

Ceux-là même qui pèsent, soupèsent, jugent, analysent, documentent, racontent, exagèrent, proclament, racontent à nouveau, déforment, condamnent ceux qui ont eu le toupet d’aller à l’encontre des principes de la bien-pensance.

Ceux-là mêmes qui, l’instant d’après, prôneront avec condescendance ces valeurs-slogans, ces valeurs-vitrines, ces valeurs-façades dont ils se coiffent, sans répit.


Comment parler d’authenticité dans cette société où parades et apparats font la loi, emprisonnant le verbe être, libérant l’avoir et le faire, enchainant la liberté au profit des conventions ?


Oui, les slogans, c’est bien.

Mais avant de les proclamer haut et fort, il faudrait peut-être commencer par les vivre.


Et avant de parler de liberté d’être soi, de liberté d’expression, de liberté tout court, commençons peut-être par respecter celle des autres ?


Car, après tout, le respect ne devrait pas répondre à des normes pour se mériter.

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